Article 12 mai 2020

Révision successorale en pleine pandémie : quelques mises en garde

Les clients semblent actuellement plus enclins à revoir leur volet successoral… Petit rappel des règles à suivre et des balises à respecter.

Certains clients craignent de contracter la COVID-19 et d’y succomber, tandis que d’autres profitent du fait qu’ils ont davantage de temps pour se consacrer à leurs affaires et les mettre en ordre. Résultat, les conseillers en services financiers sont davantage sollicités concernant le volet successoral de leur planification par les consommateurs. En tant que professionnel membre de la CSF, que devez-vous savoir et comment vous assurer que tout est fait dans les règles?

S’assurer de l’existence d’un testament

Lorsqu’il rencontre un client et qu’il réunit les renseignements nécessaires à la constitution de son dossier, le conseiller en services financiers doit notamment lui demander s’il a un testament. Ce document est essentiel pour établir la façon dont les actifs de la personne seront répartis à son décès.

Il doit aussi vérifier s’il s’agit d’un testament notarié, olographe ou devant témoins. Une précision importante, car comme l’indique la notaire et conseillère juridique Me Renée-Claude Boileau, seul le testament notarié prend effet dès le décès et n’est pas soumis à une procédure de vérification. « La loi reconnaît au notaire un statut d’officier public, ce qui permet de conférer un caractère d’authenticité au testament qu’il reçoit », explique-t-elle.

En revanche, pour produire leurs effets juridiques, le testament olographe – rédigé à la main et signé par le testateur – et celui devant témoins, devront être vérifiés par un notaire ou devant la cour. Opter pour l’un ou l’autre en pensant faire des économies est donc une fausse bonne idée. « Au décès, cela retardera le règlement de la succession et engendrera des coûts bien plus élevés qu’un testament notarié », précise Me Boileau, qui ajoute qu’un notaire connaît toutes les subtilités de la loi et s’assurera de traduire adéquatement les volontés de la personne. C’est d’autant plus important à ses yeux que les situations familiales se sont complexifiées ces dernières années, par exemple avec les familles reconstituées.

Me Boileau met également en garde contre les modèles de testament que l’on trouve en ligne. « Les informations véhiculées ou les formulaires qu’on déniche sur Internet sont souvent faux ou ne s’appliquent pas au Québec. Or, si le testament n’est pas préparé selon les règles, il ne sera pas accepté », prévient-elle.

Elle souligne également que pour faire face à la pandémie, la Chambre des notaires a pris des mesures pour la réception des signatures à distance, ce qui permet de signer un testament par voie électronique dans le cadre de rencontres virtuelles avec le notaire. Celles-ci sont par ailleurs encadrées par des règles strictes, en particulier pour s’assurer de l’identité de la personne.

Pas de décision sur un coup de tête

Pour sa part, le planificateur financier Marc Binette considère qu’il vaut mieux un testament olographe que pas de testament du tout. Il rappelle aussi que la planification successorale est un processus généralement évolutif. « Je pose un certain nombre de questions à ce sujet à chaque rencontre avec mes clients, pour vérifier si leur situation a changé par exemple. C’est un travail qui s’effectue au fil des ans », illustre-t-il.

Les principes de base demeurent cependant toujours les mêmes. Tout d’abord, identifier les objectifs du client. « Il ne faut pas hésiter à le questionner pour s’assurer de bien comprendre son but. Par exemple, lorsqu’il est question de transmission de patrimoine, on pourrait lui demander s’il a envisagé tous les cas de figure et s’il a pensé à faire un don de charité par exemple », explique-t-il.

Une fois les cibles fixées, il faut ensuite faire une solide analyse. « Si un client souhaite léguer 50% de son patrimoine à sa fille mineure, on pourrait vérifier à quel âge et de quelle façon il souhaite que celle-ci entre en possession de son héritage : à la majorité, par tranches de versement, etc. », illustre Marc Binette qui précise qu’il est crucial d’amener la personne à réfléchir à la situation et aux impacts de ses décisions sur ses proches.

Par la suite, le conseiller devra réunir les conditions nécessaires à l’atteinte des objectifs du client. Pour cela, ce dernier pourrait avoir à à modifier ses choix de produits financiers ou d’assurance, établir ou réviser son testament, préparer un mandat de protection, etc.

Durant le processus, il faut aussi garder en tête la facture fiscale et mettre en place des stratégies qui permettront de l’alléger. Lorsque le client est un entrepreneur, on doit se poser certaines questions, par exemple : la compagnie se qualifie-t-elle pour l’exonération des biens en capital lors de sa transmission? Sinon, il faudra mettre en place les mesures adéquates.

« En tout état de cause, et même s’il est normal de penser à sa planification successorale compte tenu des circonstances actuelles, on doit s’assurer que les clients ne prennent pas de décisions sur un coup de tête et qu’ils comprennent l’importance d’être bien conseillés sur les différents aspects du volet successoral », conclut Marc Binette.

Info Déonto : Connaître son client

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