Gestion des conflits d'intérêts
L’« intérêt du client » est une notion fondamentale dans les normes et obligations déontologiques auxquelles le conseiller doit se conformer. Celui-ci doit toujours l’avoir à l’esprit et ne jamais oublier que tous les gestes qu’il pose en tant que conseiller doivent être dans l’intérêt du client.
Il doit également, dans l’exercice de ses activités, agir avec honnêteté et loyauté et sauvegarder en tout temps son indépendance pour éviter de se retrouver en situation de conflit d’intérêts.
En gros, pour un conseiller, le conflit d’intérêts résulte d’une situation irrégulière où, ayant à accomplir ses fonctions d’ordre général, il a des intérêts personnels en opposition avec la mission qui lui est confiée par son client. Lors de toute opération avec un client, le conseiller doit veiller à ce que ses propres intérêts soient nettement dissociés de ceux de ce client afin qu’il n’y ait pas de conflit d’intérêts entre eux. Si le discernement du conseiller ou sa liberté d’action n’est pas à l’abri de quelque forme d’influence ou de conflit d’intérêts que ce soit, les intérêts du client peuvent être compromis.
La relation qui s’est établie entre un client et son conseiller est fondée sur la confiance. Le conseiller doit se garder de profiter de ce lien privilégié pour le tourner à son avantage, car dans la conduite générale des affaires dont son client l’a chargé, il doit porter des jugements et formuler des recommandations de façon objective et indépendante, sans égard à son gain personnel.
Situations de conflit d’intérêts
AVERTISSEMENT : les situations décrites et les précisions ci-dessous quant aux obligations des conseillers sont des indications générales.
Les conseillers doivent consulter les sous-sections Assurance et planification financière et Épargne collective et plans de bourses d’études selon leur inscription puisque la législation applicable peut ajouter des précisions ou imposer des obligations spécifiques.
De même, il est possible que les règles des courtiers ou des cabinets soient plus strictes que les indications ci-dessous. Les conseillers doivent connaître ces règles et les respecter.
Voici des situations ou comportements qui risquent fortement d’entraîner un conflit d’intérêts avec un client.
Tout d’abord, dès le décès du client, le mandat de conseiller auprès de lui prend fin. En agissant toujours à ce titre pour la succession, le conseiller s’investit donc lui-même de cette fonction.
En acceptant de devenir liquidateur, le conseiller pourrait devoir endosser un double rôle par rapport à la succession, celui de liquidateur et celui de conseiller; dans les choix qu’il sera appelé à faire, les intérêts liés à chacune de ses responsabilités pourraient entrer en conflit puisqu’il aurait carte blanche pour agir alors qu’il n’aurait pas toute la distance nécessaire pour le faire.
Même si le conseiller croit sincèrement agir dans l’intérêt de son client en acceptant d’être son liquidateur, il pourrait être en situation de conflit d’intérêts et ainsi risquer de se retrouver devant le comité de discipline de la Chambre de la sécurité financière.
Que la demande soit faite dans un testament ou non, que les membres de la famille soient d’accord ou non et que le conseiller reçoive ou pas une rémunération à titre de liquidateur, il pourrait se placer en situation de conflit d’intérêts en agissant à la fois comme conseiller et liquidateur du même client, soit la succession.
Exceptions
Dans certaines circonstances il serait possible pour un conseiller d’exercer à titre de liquidateur de succession pour un client, par exemple :
- si le conseiller n’agit pas à titre de conseiller pour la succession cliente;
- s’il accepte d’agir aussi à titre de conseiller, mais ne reçoit pas directement ou indirectement de rémunération à ce titre;
- s’il est le seul héritier de la succession de son parent (client).
La prudence est donc de mise, car chaque cas est un cas d’espèce qui sera évalué selon les faits, par le syndic et le comité de discipline en cas de plainte.
Un client peut vouloir remercier son conseiller pour ses services, ou à la suite d’une transaction particulièrement complexe. Est-il possible pour le conseiller d’accepter un cadeau d’un client? La règle générale est que le conseiller peut accepter un cadeau, mais sous certaines conditions.
- Ne doit pas être perçu comme étant susceptible d’avoir une influence sur le mandat du conseiller.
- Doit être sous forme de bien, pas sous forme d’argent.
- Constitue une exception, donc n’est pas une habitude.
- Ne doit pas aller à l’encontre des règles du cabinet, de la société ou du courtier pour lequel le conseiller exerce.
Il n’y a pas de limite officielle à la valeur d’un cadeau que le conseiller peut accepter, mais sa valeur doit être évaluée selon les circonstances et en fonction des politiques du courtier ou du cabinet auquel il est rattaché.
Par ailleurs, la fréquence doit aussi être prise en compte. Un petit cadeau offert de manière répétée peut placer un conseiller en situation de conflit d’intérêts tout autant qu’un gros cadeau offert une seule fois.
Situations de conflit d’intérêts prévisibles ou potentielles
Le conseiller pourrait se placer dans une situation de conflit d’intérêts dans les situations suivantes :
- il croit être redevable envers le client qui a offert le cadeau ;
- le cadeau est perçu comme étant inapproprié ;
- il se fait reprocher, en raison de ce cadeau, d’accorder un traitement préférentiel à ce client au détriment de ses autres clients ;
- le cadeau influence la manière d’agir du conseiller, qu’il y ait préjudice ou non pour le client ;
- il a sollicité le cadeau.
La section Marketing traite de la possibilité pour le conseiller d’offrir un cadeau à un client.
Le conseiller devient le mandataire de son client en cas d’inaptitude, c’est-à-dire qu’il sera la personne chargée d’administrer les affaires du client pendant son inaptitude.
Le conseiller pourrait alors avoir à porter deux chapeaux, celui du mandataire et celui du conseiller; il serait par conséquent susceptible de faire des choix où se confronteraient les intérêts rattachés à ces responsabilités.Le conseiller conclut une entente ou un contrat ou encore il exécute une transaction, à titre de conseiller, pour un client qui manifestement n’est pas en mesure de gérer ses affaires, à moins que ce soit avec une personne qui peut légalement décider pour ce client.
Par exemple, un conseiller ne pourrait pas conclure un contrat avec un client déclaré inapte ou qui démontre des signes d’inaptitude il devrait traiter les affaires de ce client avec le mandataire en cas d’inaptitude.- Le conseiller conclut une entente ou un contrat ou encore il exécute une transaction, à titre de conseiller, pour un client dont il est le tuteur datif, le curateur ou le conseiller au sens du Code civil du Québec.
- Le conseiller devient fiduciaire de la fiducie mise en place par son client tout en exerçant son rôle de conseiller pour celle-ci.
- Le conseiller est membre du conseil d’administration d’une entreprise et agit comme conseiller auprès de cette même entreprise (cliente).
Dans une telle situation, lorsque c’est le client qui souhaite l’implication du conseiller, mais que celle-ci pourrait l’empêcher de servir les intérêts du client avant les siens, il vaut mieux refuser en lui expliquant les raisons justifiant son refus.
Certaines conditions pourraient toutefois permettre au conseiller d’agir en tant qu’administrateur d’une entreprise cliente sans pour autant se placer dans une situation de conflit d’intérêts réel ou potentiel. - Le conseiller se lance en affaires avec un client ou investit avec lui dans une entreprise.
- Le conseiller propose à un client d’investir dans une société dans laquelle il a un intérêt direct ou indirect, même s’il agit sans mauvaise intention.
Le simple fait que la demande soit faite par le client ne permet pas d’emblée au conseiller d’accepter l’investissement de son client dans une société dans laquelle il a un intérêt. - Le conseiller recommande à un client un produit particulier pour obtenir une commission plus élevée, bien que ce produit ne convienne pas au client.
- Le conseiller propose un produit avec frais d’acquisition reportés afin de recevoir rapidement des revenus de commission élevés à un client dont l’horizon de placement est court.
- Le conseiller recommande à un client une stratégie à effet de levier pour procéder à un investissement alors que ce client n’a pas le profil justifiant une telle recommandation.
- Le conseiller exerce un rôle impliquant une relation d’autorité ou d’influence, comme :
– Participer aux activités de certaines associations professionnelles.
– Faire du bénévolat pour certains organismes.
En cas d’incertitude ou de situations non identifiées dans la réglementation ou dans ces pages le conseiller doit s’en remettre aux règles établies par son cabinet ou son courtier ainsi qu’aux principes qui peuvent guider sa conduite et les suivre en tout temps : l’objectivité, l’indépendance professionnelle et l’intégrité. Il verra à se poser les bonnes questions, en fonction de la situation, pour éviter toute possibilité de conflit d’intérêts. Par exemple :
- Si j’accepte le cadeau offert par mon client, cela aurait-il un impact sur l’objectivité de mes conseils?
- Est-ce qu’un tiers pourrait croire que j’agis dans mon propre intérêt plutôt que dans celui du client?
- Est-ce que ma recommandation au client aurait été différente si l’incitatif de vente n’avait pas existé?
- Est-ce que mon indépendance professionnelle à l’égard du client pourrait être compromise même si je n’ai aucun intérêt direct dans la transaction?
Si la réponse à l’une de ces questions est « oui », le conseiller court un risque de conflit d’intérêts.
Le conseiller doit prendre connaissance des règles particulières établies à ce sujet par son cabinet ou son courtier et veiller à les respecter.
En matière de conflit d’intérêts, les circonstances sont déterminantes dans l’évaluation de la situation. En évitant de se placer dans des situations conflictuelles, le conseiller veille à la crédibilité de sa profession, préserve la confiance du public dans ses services et suscite le respect par son professionnalisme.
Le conseiller devrait toujours pencher du côté de la prudence, car même s’il est de bonne foi, que ses motivations sont nobles et que le client ne subit ni perte financière ni aucun autre désavantage, il risque tout de même de commettre une faute.
En cas de doute, le conseiller devrait consulter un tiers indépendant ou obtenir un avis juridique pour se protéger.